lundi 1 octobre 2012

Le Masstige

b« L’élitisme de masse c’est mon rêve depuis longtemps. Je pense qu’il était presque de mon devoir de faire ça avec mon nom, c’est le chemin de la modernité », a annoncé Karl Lagerfeld, directeur artistique de Chanel et Fendi. Dans quelques temps, celui-ci va lancer une nouvelle collection de vêtement destinée au grand public.
Cette annonce serait la concrétisation d'un phénomène observé depuis quelques années: le "masstige".
Le terme "masstige" provient de l'alliance du mot "mass market" (marché de masse) et du mot "prestige"; deux mots complétement opposés. Ce terme est apparu il y a six ans, et désigne un phénomène plus ancien qu'est l'union d'une marque de grande consommation avec une marque de luxe. Le principe est simple: associer un créateur de renom qui va dessiner et créer des produits pour l'enseigne, cela va plus loin qu'un parteneriat entre deux marques (i.e.le co-branding). La marque de luxe prête son nom à une marque populaire, qui cible un public autre que celui du marché du luxe.Le but principal est de mettre en place une action marketing de courte durée afin de doper les ventes dans des périodes creuses. L'opération doit être éphémère pour diminuer au mieux une éventuelle décrédibilisation pour la maison de luxe, cette collaboration doit rester de l'ordre de l'"expérimental".
De nombreuses collaborations ont été mises en place comme : Jean-Paul Gautier avec la redoute, Chritian Lacroix pour Larousse ou en encore Lagerfeld pour les 3suisses, entre autres.
Les marques de luxe se trouvent ainsi sur plusieurs segments, celui du haut luxe et du luxe accessible.


Karl Lagerfeld prête son image pour Coca-Cola

Le pionnier du "masstige" est sans conteste l'enseigne suédoise H&M (Hennes et Mauritz), qui propose des vêtements "tendance" à bas prix. Depuis plusieurs années, elle fait appel à des grands maîtres de la mode et du luxe (Karl Lagerfeld, Stella Mcartney, Sonia Rykiel, Jimmy Choo). Le dernier en date ,et non des moindres, est la collaboration avec une des plus anciennes maison de couture française, Lanvin. Albert Elbaz, le directeur artistique de Lanvin, a déssiné toute une collection de robes, de costumes et d'accessoires pour l'enseigne de grande distribution. ce nouveau coup de pub a été mené par une stratégie bien "huilée". Pendant plusieurs semaines, le géant suédois à préparé la sortie de cette collection par la publication de photos de la collection dans des magazines triés sur le volet,présentation des produits lors d'une conférence de presse, elle a aussi dévoilé peu à peu des vidéos sur internet, etc. Coup de pub réussi, le jour même, des centaines de personnes ont attendu devant le magasin des champs Elysées, depuis 5h30 du matin,comme s'ils allaient assister à un concert,. De plus, la période est toujours bien définie, aprés la rentrée et avant les fêtes de fin d'année. Cet engouement est sûrement dû au faut qu'ils peuvent, au moins une fois dans leur vie, avoir accès au luxe, et donc à tout ce qu'il engendre. Néanmoins, les prix restent quand même plus chers que la moyenne des prix de ce type de biens mais restent abordables par rapport au prestige de la marque.



Cette accessibilité du luxe est une part de "rêve" qui se réalise pour bon nombre de consommateurs attirés par les biens du luxe et qui n'ont pas les moyens financiers de s'en procurer. On assiste à ce qu'on peut appeler la démocratisation du luxe. Néanmoins, l'essence même du luxe est qu'il doit être ouvert, c'est-à-dire connu de tous, mais en même temps fermé, il doit être réserver à une clientèle privilégiée, aisée. Le luxe doit garder sa rareté et son authenticité.
Cette démocratisation du luxe peut donc entrainer des effets négatifs, les personnes qui consomment habituellement des biens de luxe peuvent voir en ce concept de "masstige" une dévalorisation de la marque et donc décider de ne plus la consommer car, pour celles-ci, le luxe ne rime pas avec grande distribution.

En plus de ces partenariats, d'autres procédés permettent une meilleure accessibilité au luxe. On a les "e-tailers", ce sont des sites qui ont devancés la vente en ligne des marques de luxe, ce sont des distributeurs multimarques. Ce qui marche le plus, ce sont quand même les sites de ventes privées en ligne et les sites dits de "seconde main" qui revendent des articles de luxe d'occasion comme par exemple sur Ebay.
Mais depuis peu de temps, on assiste aussi au développement de la location d'articles de luxe, on peut louer, par exemple, un sac ou une robe de luxe seulement pour une soirée.

Ne serait-ce donc pas çà la modernité évoquée par Karl Lagerfeld ? Permettre à toutes de porter une robe d'un grand créateur l'espace d'une soirée, de pouvoir se fournir une part de rêve.

                                                                                                                                           M. Rey